Interview

Lucas Bechoux décroche une bourse SH pour ses recherches sur l’influence de l’industrie pharmaceutique dans le secteur médical


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Comment préserver l’indépendance du secteur médical par rapport à l’industrie pharmaceutique ? Cette question cruciale, particulièrement à l’heure de la crise sanitaire que nous traversons, fait l’objet des recherches de Lucas Bechoux.

Peux-tu nous en dire plus sur ton projet de recherche ?

Les interactions entre les professionnels de la santé, le monde académique et les entreprises pharmaceutiques ont permis l’avènement de progrès scientifiques majeurs. Cependant, les potentiels conflits d’intérêts qui peuvent découler de ces relations ont souvent des effets néfastes sur la santé humaine, pouvant miner la confiance des citoyens vis-à-vis du monde médical.

L’Affaire du Mediator en France est un exemple emblématique des dérives engendrées par une absence de régulation claire des conflits d’intérêts dans le secteur. Par ailleurs, les études se multiplient pour démontrer comment l’influence des entreprises du médicament impacte négativement la qualité de prescription des praticiens.

Dans ce contexte, mon projet a pour objectif d’interroger l’indépendance du monde médical belge vis-à-vis de l’industrie pharmaceutique. Pour ce faire, mes recherches vont s’articuler autour de trois grands axes : la formation initiale, la formation médicale continue (FMC) ainsi que la recherche et l’innovation scientifique médicale.

Dans un premier temps, j’analyserai le concept d’influence en médecine au travers du prisme des sciences sociales. Dans un second temps, en consultant des acteurs de terrain, j’élaborerai des indicateurs pour évaluer le degré d’indépendance des facultés de médecine, des hôpitaux universitaires ainsi que des principaux hôpitaux non universitaires belges. De ce travail avec les acteurs résultera la production de guidelines et de recommandations relatives à la gestion de l’influence de l’industrie pharmaceutique au sein de la formation et de la recherche médicales.

Qu’est-ce qui t’a poussé t’intéresser à ce sujet ?

Durant ma deuxième année de master, j’ai répondu à une proposition de sujet de TFE de mon co-promoteur le Dr. François Thoreau. Il s’agissait d’élaborer un classement des facultés de médecine belges en fonction de la qualité de leurs politiques de gestion des conflits d’intérêts avec l’industrie pharmaceutique. Des études similaires avaient déjà été menées notamment aux USA, en France et en Allemagne.

Ce projet m’a réellement passionné et c’est ainsi que j’ai décidé d’élargir la portée de mes recherches afin de les poursuivre dans le cadre d’une thèse.

Que peuvent nous apprendre ces recherches sur la société d’aujourd’hui ?

La médecine occupe une place très importante dans nos sociétés occidentales et la crise sanitaire actuelle rappelle le rôle fondamental que jouent les structures de santé.

Il est essentiel de connaître la place qu’occupent les intérêts privés dans un système qui se doit de défendre l’intérêt général. Comment produisons-nous la connaissance médicale et quel modèle souhaitons-nous pour la médecine de demain ? Mon projet a l’ambition de contribuer à nourrir cette réflexion profonde et de baliser la voie vers une médecine affranchie d’influences néfastes et qui œuvre dans l’intérêt du patient.

Quelles sont les prochaines étapes pour tes recherches ?

Dans les semaines à venir, le classement des facultés de médecine belges que j’ai réalisé conjointement avec des médecins membres de l’ASBL Groupe de Recherche et d'Action pour la Santé sera rendu public. Nos résultats seront publiés dans un article à paraître dans la revue scientifique médicale PLOS ONE. Cette publication constituera un premier jalon dans mon parcours de thèse. Nous espérons qu’elle suscitera une prise en considération de l’importance d’un encadrement de l’influence de l’industrie pharmaceutique dès les premiers stades de la formation médicale.

Son parcours

Lucas est titulaire d’un master en sciences politiques de l’Université de Liège. Depuis le mois de mars 2020, il travaille au sein du centre de recherche Spiral en tant qu’assistant de la Professeure Catherine Fallon. Il a notamment travaillé à la publication d’un rapport sur l’impact des espaces verts et bleus urbains sur la santé dans le cadre d’une recherche du Conseil Supérieur de la Santé. Il a également assisté le Dr. Maxime Petit Jean dans la réalisation du projet DIGI4FED financé par BELSPO.

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